À un cheveu près... [Enquête]

Chapitre 1

Le mois d'août venait d'arriver et avec lui son lot de crimes en tous genres. Les meurtriers et autres voleurs ne prenaient pas de vacances. Et de ce fait, nos experts non plus. C'est ainsi que Sheldon, Stella et Lindsay furent appelés sur une scène de crime à Central Park. Après avoir fait le court trajet les séparant du parc, ils descendirent de leur véhicule sous un soleil de plomb, ce qui fit grimacer Lindsay.

"Non mais regardez-moi ce temps magnifique ! Dire que je pourrais être ici avec Lucy au lieu de me retrouver le nez dans un cadavre !"
"Tes vacances vont vite arriver."
"Facile à dire pour toi Sheldon, tu pars à Hawaï dans quelques heures !"
"C'est ça la différence entre docteur et lieutenant."

La remarque de leur collègue fit rire les deux jeunes femmes. Mais le sourire de Lindsay s'effaça bien vite lorsqu'elle vit le nombre incalculable de familles étendues sur l'herbe, mangeant des glaces et jouant au foot. Elle poussa un soupir imperceptible et suivit ses collègues dans la direction opposée à toute cette animation. Quelques mètres plus loin, dans un coin plus retiré du parc, se dressait la trop familière banderole jaune et noire "Crime Scene - Do not cross". Devant elle se tenait un jeune policier. Ils lui présentèrent leurs badges et furent autorisés à passer. Le corps se trouvait non loin devant eux. Ils déposèrent leurs mallettes et s'approchèrent. Un autre policier, qu'ils n'avaient pas remarqué, s'avança vers eux.

"Vous êtes la scientifique ?"
"Exact. Lieutenants Bonasera et Messer, Docteur Hawkes."
"Ha c'est vous le légiste ?"
"Euh on peut dire ça..."

Le jeune policier lui fit signe qu'il pouvait venir examiner le cadavre. Pendant ce temps, Lindsay et Stella tentèrent d'obtenir quelques informations sur la victime.

"Qui a découvert le corps ?"
"Une vieille dame qui promenait son chien. Elle était quelques mètres plus bas, sur le petit sentier, quand le chien s'est mis à aboyer et à courir dans cette direction. Le temps qu'elle le rattrape, il était posté non loin du corps. Elle nous a tout de suite appelé. On l'a interrogée mais elle ne savait rien de plus."
"Et sur la victime, qu'est-ce qu'on sait ?"
"Pas grand chose. Elle n'avait pas ses papiers sur elle. Vous aurez peut-être plus de chance avec ses empreintes ou son ADN."
"Merci. Vous pouvez partir."

Le jeune homme fit signe à son collègue et tous les deux quittèrent les lieux. Lindsay et Stella retournèrent vers Sheldon, pour entendre ses premières conclusions.

"Elle présente des blessures défensives sur les mains et les bras. On trouvera peut-être l'ADN du meurtrier sous ses ongles."
"Et la cause de la mort ?"
"À première vue je dirais strangulation. Mais Sid nous en dira plus."
"Bon laissons ça de côté pour le moment et concentrons-nous sur les indices."

Ils partirent chercher leur matériel et entreprirent de ratisser la scène de crime. Au bout d'une heure de fouille méthodique, ils avaient récolté une boucle d'oreille, une mèche de cheveu et une empreinte de chaussures qui n'appartenaient pas à la victime.

"L'assassin serait donc une femme ?"
"On a tout lieu de le penser. Mais ramenons le corps et les indices au labo pour en être sûr."
"On s'en occupe Sheldon, vas-y, tu vas rater ton avion."
"Merci les filles ! Je vous dis à dans deux semaines."
"Repose-toi bien."

Elles regardèrent leur ami s'éloigner vers le soleil et la détente, non sans une pointe d'envie. Puis elles partirent à leur tour vers le labo, pour terminer au plus vite cette enquête.

Chapitre 2

"Enfin, j'ai terminé !"

Lindsay avait porté les indices relevés sur le terrain à Adam et avait profité du temps d'attente des résultats pour mettre à jour quelques dossiers. Elle avait préféré s'occuper l'esprit plutôt que de ruminer sans cesse qu'elle serait mieux dehors. Mais l'envie de se prélasser sur un fauteuil, de bronzer étendue sur l'herbe de Central Park en regardant Danny et Lucy jouer reprit vite le pas sur les noms des victimes et des coupables qu'elle venait de noter. Elle se leva de son bureau et alla se poster derrière la fenêtre, qui offrait une très belle vue d'ensemble sur la ville. Elle se perdit dans la contemplation et peu après, dans ses pensées. Elle songeait à Sheldon, qui devait à présent survoler les eaux turquoises du Pacifique en direction d'îles et de plages magnifiques. Tout à coup, elle eut envie de se précipiter à La Guardia, de sauter dans un avion en partance pour une destination inconnue. Les noms de Bali, Ibiza, Cancùn ou encore Punta Cana dansaient dans son esprit lorsqu'elle fut tirée de sa rêverie par un bruit familier : la sonnerie de son biper. Elle regarda qui avait osé la déranger à un moment pareil en maugréant. Adam. Elle esquissa un sourire : sans le vouloir, il venait de lui rappeler qu'elle était loin de ces endroits de rêve, et loin d'être en vacances. Elle glissa l'appareil dans sa poche et se dirigea vers le laboratoire.
Dès qu'elle put apercevoir son jeune collègue, elle sut que quelque chose n'allait pas. Il semblait anxieux. Elle frappa doucement à la porte restée ouverte et entra. Adam sembla soulagé de la voir arriver.

"Tu as les résultats ?"
"Oui. Enfin en réalité, j'ai plutôt une bonne et deux mauvaises nouvelles."
"Ah..."
"Je commence par quoi ?"
"La bonne. On verra le pire après."
"Très bien. J'ai examiné la trace de semelle que vous avez trouvé. Par chance, c'est un modèle unique, fabriqué pour les cinquante ans de la marque. J'ai contacté le fabriquant, et seules cinquante paires ont été symboliquement créées et vendues. Il me fait parvenir la liste pour demain."
"Parfait."
"On passe aux mauvaises ?"
"Il le faut bien."
"Ok. D'abord les boucles d'oreille. Je n'ai trouvé aucune cellule épithéliale, donc pas d'ADN."
"Et pour le cheveu ?"

À l'instant même, Lindsay comprit qu'elle avait vu juste. Quelque chose clochait. Adam froissait nerveusement la dernière feuille de papier qu'il tenait dans les mains. Il n'osait pas dire ce qu'il avait découvert. Il jeta un coup d'oeil apeuré à Lindsay, comme s'il cherchait un moyen de faire que ces résultats n'aient jamais existé.

"Qu'est-ce qu'il y a Adam ?"
"Hé bien... sur le cheveu j'ai réussi à extraire de l'ADN. J'en avais à peine de quoi effectuer un test, mais c'était suffisant. C'est pour ça, au début j'ai cru que je m'étais trompé mais j'ai refait encore et encore jusqu'à ne plus en avoir et..."
"Ola doucement Adam !"
"Pardon... Je disais juste... J'ai vérifié autant de fois que cela était possible Lindsay, et je suis toujours tombé sur le même résultat."
"Mais qu'est-ce qu'il a donc, ce résultat ?"

Adam lui tendit précipitamment la feuille, comme s'il craignait de ne plus en avoir le courage dans les instants qui allaient suivre. Lindsay la parcourut rapidement du regard et se figea devant le nom qui s'affichait devant ses yeux. Elle le relut plusieurs fois. Il y avait forcément une erreur. Adam sembla lire sa pensée et répondit à sa protestation muette :

"Il n'y a pas d'erreur Lindsay. J'aimerais te dire que je me suis planté, mais ce n'est pas le cas."
"Mais Adam, c'est impossible."
"Apparemment pas."
"Attends, tu ne crois quand même pas que..."
"Les preuves ne mentent jamais."
"Oh je t'en prie, arrête de faire le philosophe, ça ne te va absolument pas !"

Légèrement énervée, Lindsay s'en alla en hâte du laboratoire. Adam passa sa tête à travers l'entrebâillement de la porte et lui cria :

"Attends, où tu vas ?"
"Je vais porter ça à Mac."
"On ne devrait pas plutôt en parler à...?"
"NON ! C'est Mac qui doit le savoir en premier."
"Mais..."

Elle ne lui laissa pas le temps de la contredire et elle partit en trombe vers le bureau de son supérieur. Elle frappa énergiquement à la porte et attendit une réponse. Lorsque Mac l'invita à entrer quelques instants plus tard, elle s'était un peu apaisée et commençait à se demander si elle n'aurait pas fait mieux d'écouter Adam. Mais il était trop tard pour reculer.

Danny et Don sortirent silencieusement de la maison des Oliver et montèrent dans la voiture.

"Au moins on est sûr que ce n'est pas Stella !"
"Tu en doutais ?"
"Non Danny, bien sûr que non, mais..."
"Oui. Par rapport à Mac."
"C'est ça... D'ailleurs je vais l'appeler, qu'on aille interroger cette Linda Talbot tous les deux."
"Je te laisse avec plaisir, je risquerais de m'énerver."
"Je te dépose chez toi ?"
"Avec plaisir aussi !"

Les deux jeunes lieutenants se dirigèrent vers l'appartement de Danny, puis Don partit chercher Mac. Après un court trajet durant lequel ils s'étaient à peiné adressés la parole, ils arrivèrent chez Mme Talbot. Peu après qu'ils eurent sonné, la jeune femme d'une quarantaine d'années vint leur ouvrir.

"Bonjour."
"Bonjour madame, lieutenants Taylor et Flack, police de New York."
"Entrez."

Flack s'étonna que la jeune femme ne leur demande pas le motif de leur visite. Il supposa qu'elle s'en doutait et s'assit sur le fauteuil qu'elle lui indiquait sans poser de questions.

"Vous venez pour le Dr Oliver ?"
"C'est exact. Elle était votre oncologue je crois."
"Oui. C'est affreux ce qui lui est arrivé."
"Vous ne semblez pas très peinée."
"Bien sûr que si, nous étions proches."
"Où étiez-vous le soir du meurtre entre minuit et 3h du matin ?"
"Qu'est-ce que vous insinuez ?"
"Répondez à la question du lieutenant Flack."
"Hé bien... J'étais ici, dans mon lit. Et seule, avant que vous ne me le demandiez."
"Vous n'avez donc pas d'alibi."
"Ça semble évident..."
"Vous savez que tout cela ne joue pas en votre faveur ?"
"Pourquoi ? Des tas de personnes qui la côtoyaient n'ont pas d'alibi non plus, pourquoi vous en prendre à moi ?"
"À cause de ceci."

Mac sortit de sa poche un sachet plastique contenant un carnet de couleur rouge, portant le nom de "Linda Talbot" sur la couverture. Reconnaissant le carnet de son médecin, la jeune femme s'enflamma.

"De quel droit avez-vous eu ça !? Cela tient du secret médical vous n'avez pas le droit !"
"Il y a eu meurtre. Son mari vous a décrit comme suspect potentiel, nous avons obtenu un mandat pour vérifier et nous y avons trouvé des choses très intéressantes."
"Attendez... c'est Robert qui vous a parlé de moi ?"
"Vous connaissez le mari de la victime ?"
"Hein ? Non je... pas vraiment. Bon et qu'est-ce que vous avez trouvé ?"

Don et Mac se regardèrent un instant, puis ce dernier décida de ne pas s'attarder sur la question du mari.

"Nous y avons trouvé des traces d'altercation fréquentes entre vous deux."
"J'étais entre la vie et la mort, lieutenant. À ma place vous auriez été aussi énervé."
"Ces disputes n'étaient donc pas sur des sujets importants ?"
"Non, des bêtises..."
"Bon, dans ce cas nous allons vous laisser."
"Mac je ne pense pas que..."
"Au revoir madame, merci de votre accueil."

Mac se dirigea vers la sortie, suivi peu après d'un Don incrédule.

"Mais enfin qu'est-ce que vous faites ?"
"Montez."

Don s'exécuta, ne comprenant toujours pas où son supérieur voulait en venir.

"Mais enfin Mac, c'est évident que c'est elle, elle a menti du début à la fin."
"Oui, pour ses sentiments à l'égard de Donna, sur son alibi, sur le mari de Donna et sur les disputes. Je sais."
"Mais alors pourquoi êtes-vous partis ?"
"Mais parce qu'on a rien contre elle ! Je ne peux pas l'arrêter parce que j'ai l'impression qu'elle ment !"
"C'est ça, en fait vous pensez toujours que c'est Stella qui l'a tuée !"
"MAIS ARRÊTEZ AVEC ÇA ! Je n'ai JAMAIS dit que Stella était coupable, JAMAIS !"
"VOUS MENTEZ, VOUS AVEZ DEMANDÉ À SID SI ELLE AVAIT PU FAIRE ÇA !"
"MAIS PARCE QUE JE VOULAIS ÊTRE SÛR DU CONTRAIRE !"
"Mac c'est bien le problème. Que Sinclair aille vérifier parce qu'il a des doutes, d'accord. Un de nous, ça peut passer. Mais pas vous. Vous êtes son meilleur ami, vous ne pouvez pas douter d'elle sur des affaires comme celles-ci. Ou si vous le faites, cela veut donc dire qu'elle ne représente rien pour vous."

Le temps de leur discussion, ils étaient arrivés devant les locaux de la police. Don descendit précipitamment, sans un regard à Mac. Ce dernier posa la tête sur le volant et soupira. Tous les détestaient à présent. Comment leur faire comprendre qu'il avait juste voulu s'assurer que Stella n'y était pour rien ? Cela avait peut-être été maladroit de sa part, et il n'avait peut-être pas utilisé les mots qu'il fallait, mais cela n'avait jamais été contre elle. Quelques minutes plus tard, il prenait la route qu'il ne connaissait que trop bien de l'appartement de son amie.