Décompte/des contes de Noël [générale]

Stella

Remontant de la morgue, Stella se dirigea vers la salle de repos. Elle se fit couler un café bien chaud car l’hiver était particulièrement rigoureux à New York cette année.
Elle prit son gobelet et s’installa à une des tables hautes pour insérer le rapport de Sid dans le dossier de la victime qu'elle prit le temps de relire. Don avait retrouvé son nom: Pamela Hardings, 37 ans. Divorcée, au chômage, droguée, la pauvre femme se prostituait depuis une dizaine d'année du côté des docks. Pas de famille, pas d'ami, ... Cela lui fila presque le cafard !

Quand elle eut terminé elle se leva et voulu jeter le verre vide. Elle chercha la poubelle des yeux, un sapin trônant à la place du conteneur.
Elle trouva la corbeille de l’autre côté de la pièce et jeta un regard agacé à l’arbre scintillant.
Elle n’avait jamais beaucoup aimé Noël. Cette fête lui rappelait trop l’orphelinat où le personnel d’encadrement les réunissaient l’après midi dans le réfectoire configuré pour l’occasion en salle de spectacle. Ils regardaient tous une rediffusion des cartoons de la Warner puis ils avaient droit à un chocolat chaud et un petit gâteau avant que le cuisinier, déguisé en Père Noël pour l’occasion, leur distribuait un petit cadeau : un livre ou une poupée la plupart du temps.
Elle avait longtemps gardé précieusement ces maigres présents puis un jour elle avait tout jeté pour tourner la page de son enfance morose.

Une fois adulte elle n’avait jamais eu l’occasion de passer un vrai Noël. Elle avait fait quelques fêtes avec des amis mais cela ressemblait plus à une fiesta étudiante qu’à un repas traditionnel. A l'époque elle aurait tout donné pour connaître les chants de Noël, la découpe de la dinde aux marrons, le feu crépitant. Toutes ces choses que ses amis de l'époque, en pleine crise d'adolescence, fuyaient pour se sentir plus adulte.

Maintenant elle préférait travailler et cette année encore elle s’était portée volontaire pour faire la permanence entre les fêtes. Mac faisait de même depuis la mort de sa femme et, quand la journée était calme, ils pouvaient passer quelques temps dans le bureau de l’un ou de l’autre à discuter tranquillement.

Elle se rendit au labo des recherches de trace pour retrouver Adam et voir si le jeune technicien avait pu trouver quelque chose concernant l’arme repêchée dans l’Hudson.

Adam

Adam bascula son iPod sur shuffle et laissa soin au lecteur MP3 de faire la sélection des morceaux de l’après-midi. Il profitait de l’absence de Mac, parti en intervention, pour faire ses analyses en musique car il savait que son chef n’aimait pas trop le voir avec des écouteurs sur les oreilles.
Après un bon classique des Lynyrd Skynyrd il s’attendait à enchaîner sur quelque chose de comparable. A son étonnement ce sont les premières notes de « Let it snow » par Franck Sinatra qui s’égrenèrent. Il failli en lâcher son éprouvette.
« Qu’est ce que ça fout là !? » Se demanda t’il en sortant l’iPod de sa poche.
Ca devait encore être une idée farfelue de sa copine du moment ! Jane, bien que tatoueuse, était très traditionnelle pour beaucoup de choses, mais là c’était vraiment n’importe quoi ! Il soupira, non il ne pouvait pas lui en vouloir. Elle ne savait pas que Noël le mettait mal à l’aise.

Tout ce qui avait rapport avec cette fête lui rappelait l’humiliation annuelle du déballage des cadeaux. Son père prenait un malin plaisir à lui acheter des présents ridicules ou totalement hors de propos : des gants de boxe alors qu’il détestait se battre, des disques de country sudiste qui lui donnait des boutons, un blouson en cuir lui qui ne jurait que par les chemises à carreaux cool. Son paternel projetait inlassablement ses désirs et ses aspirations sur son fils et ne se gênait par pour l’assassiner verbalement dès qu’il trouvait que ce dernier l’avait déçu.
Il n’y a que l’année de ses 15 ans que le vieux ne s’était pas trompé. Avec toute la famille ils s’étaient cotisés pour lui offrir son premier ordinateur : un Amstrad PC W16. En déballant l’ordinateur il avait espéré que les relations avec son père allaient s’améliorer mais la bonne humeur ne dura que quatre jours. Cela restait cependant le plus beau cadeau de sa vie. Il l’avait encore et le trimballait d’appartement en appartement.

Un bip le ramena au présent. Les empreintes relevées avec difficulté sur le couteau que lui avait apporté Stella correspondaient à un nom dans le fichier.
« J’arrive au bon moment on dirait »
Le jeune technicien se tourna vers sa collègue et lui tendit la feuille.
« Il n’y a plus qu’à le cueillir.
- Merci Adam » Stella lui tapota sur l’épaule et fila chercher Don.
« De rien » marmonna le jeune homme en effaçant la chanson du crooner de sa liste de lecture.