Lie or Truth ? [Lie To Me/Ship]

Lorsqu'ils entrèrent dans la pièce, ils se trouvèrent en face d'un homme d'une cinquantaine d'années dans un costume type de chef de multinationale. Il semblait très tendu, ce qui était légitime car sa carrière dépendait de cet entretien. Cal s'assit en face de lui et entreprit de le regarder dans les yeux, histoire de le mettre mal à l'aise. Mr Ferguson déglutit avec difficulté. Cal vit que son intimidation avait fait son effet et commença l'interrogatoire.

"Comment va Johanna aujourd'hui ? Ou non plutôt... Rosemary, c'est ça ? C'est qu'on s'y perdrait !"
"Dr Lightman, je ne trompe pas ma femme."
"Oh c'est faux ça. Très très faux. Je pensais qu'un grand patron tel que vous savait mentir mieux que ça !"
"Je vous assure que je ne mens pas !"
"Vous savez ce qu'on dit : "Your face can say you're lying when your mouth says you're not." Vous illustrez parfaitement cet exemple."
"C'est la vérité, j'aime ma femme."
"Ça n'empêche rien !"

Cal et Gillian s'étaient exclamés au même moment. Ils se regardèrent et un sourire illumina leur visage. Cal était tellement heureux qu'il ne s'aperçut pas que celui de Gillian était parti presque aussi vite qu'il était venu ; il savait qu'au fond, rien n'avait changé. Il reprit donc l'interrogatoire avec plus d'entrain qu'il ne l'avait commencé.

"Ce n'est pas en nous mentant que vous allez garder votre place. Si vous avez d'assez bonnes raisons, on peut voir..."
"Ecoutez. J'aime ma femme, j'aime ma Johanna plus que tout, sincèrement."
"Là je vous crois."
"Mais Rosemary... je sais que je n'aurais pas dû, mais j'ai eu le coup de foudre. Vous savez que ces choses ne se commandent pas. Je n'ai rien pu faire."

Cal resta silencieux. Il savait que cet homme aimait sincèrement les deux femmes et qu'il était un peu dépassé par les évènements, mais il ne savait pas si cela consistait un argument pour le virer ou le garder. Mais avant qu'il n'ait pu réagir, Ferguson se tourna vers Gillian et prononça les paroles de trop :

"Vous je sais que vous me comprenez. Vous lisez dans les yeux des gens, et pour certains choses moi aussi. Vous savez que je ne mens pas, vous savez ce que je ressens. Car je vois que vous ressentez la même chose. Vous aussi vous êtes amoureuse de la personne qu'il ne faudrait pas."

À ces mots, Gillian maudit l'homme qu'elle avait en face d'elle et avant d'avoir pu se retenir, elle le gifla. Les deux hommes furent autant éberlués l'un que l'autre. Puis, horrifiée, elle balbutia :

"Je... Je suis désolée..."

Et elle partit en courant, les larmes lui montant aux yeux. Ferguson essuya le sang qui gouttait de son nez et, la surprise laissant place à la colère, il hurla :

"Non mais elle est malade celle-là !"
"Mr Ferguson, je suis désolé de ce qui..."
"Je me fous de vos excuses ! Vous allez entendre parler de moi Lightman ! Je vais vous coller un sacré procès au cul, vous allez voir !"

Et il sortit de la pièce, furibond, laissant un Cal Lightman désemparé.

À son tour, Cal sortit de la salle. Il avait été très surpris de la réaction de Gillian. Il ne comprenait pas pourquoi elle avait agi ainsi. Visiblement, il n'était pas le seul à se poser des questions car Eli et Ria vinrent le voir dès qu'il franchit la porte.

"Cal ? Qu'est-ce qui s'est passé ?"
"Vous l'avez frappé ?"
"Pas moi... c'est Gillian."
"Gillian !?"
"Ça me surprend autant que vous...Je ne sais pas ce qu'il lui a pris... Je vais aller la voir."
"Ce n'est peut-être pas une bonne..."

Mais Cal était déjà parti avant que Ria ne finisse sa phrase.

"...idée..."
"Tu crois qu'on a fait une boulette ?"
"J'espère pas..."

Cal arriva devant le bureau de sa collègue. Il frappa et entra. Elle était assise sur son fauteuil, l'air absent. Il remarqua qu'elle avait pleuré et son coeur se serra. Il s'avança et s'assit en face d'elle, comme ils avaient l'habitude de le faire. Elle leva les yeux vers lui.

"Tu es venu pour me virer ?"
"Non, pas du tout."
"Alors pourquoi t'es là ?"

Elle avait dit cela sur un ton dur qu'il ne lui avait jamais entendu. Il se rapprocha un peu et posa sa main sur la sienne. À son contact, elle la retira très vite : elle ne pouvait pas supporter ça. Il n'insista pas, mais la tristesse se lisait sur son visage.

"Je... on est amis non ? Je m'inquiète pour toi. Dis-moi ce qu'il y a."
"Rien..."
"Gillian, personne ne peut me mentir. Surtout pas toi..."
"Tu ne comprendrais pas."
"Laisse-moi essayer, je t'en prie, je veux t'aider."
"Tu ne peux pas..."
"Pourquoi ?"

Elle aurait voulu lui dire que c'était lui la cause de son mal-être, et qu'il ne pouvait rien y faire à moins de l'aimer aussi. Elle aurait voulu lui dire que si elle lui parlait comme ça, c'était pour éviter de se trahir, pour qu'elle puisse lui dire en face : Je t'aime Cal. Mais ces quatre mots n'arrivaient pas à passer la barrière de ses lèvres, pas plus que tout autre mot, alors elle se contenta de rester silencieuse. Mais Cal ne laissait pas tomber :

"C'est à cause de l'attentat, n'est-ce pas ?"
"Tu crois...?"
"Oh Gillian ! Je sais que tu crois que c'est ta faute si ce jeune homme est mort mais tu n'y es pour rien, tu as fait ce que tu as pu. Tu n'as rien à te reprocher."

Elle avait eu la faiblesse de croire qu'il avait compris... Même si elle ne le voulait pas, au moins ça l'aurait soulagée. Mais il pensait juste qu'elle était mal à cause du remords. À travers les larmes qui avaient recommencé à couler après cette désillusion, elle laissa échapper un rire amer.

"Tu crois vraiment que c'est ça ? Et tu dis me connaître et pouvoir m'aider ? Mais comment est-ce que tu le pourrais alors que tu ne comprends même pas ce qu'il y a ?"
"Si tu me le disais, je pourrais t'aider !"
"Tu devrais comprendre !"
"C'est moi ? C'est de ma faute si tu es dans cet état ?"
"MAIS BIEN SÛR QUE C'EST À CAUSE DE TOI !"

Elle ne pouvait plus se contenir et ses sanglots redoublèrent. Elle ne résista même pas quand Cal l'attira contre lui et la serra dans ses bras. Il resta silencieux un moment, ne voulant pas courir le risque de dire quelque chose qu'il n'aurait pas dû. Cela faisait des mois qu'il attendait cet instant, il voulait qu'il se prolonge indéfiniment. Mais une question lui brûlait les lèvres :

"Qu'est-ce que je t'ai fait, Gillian ?"

Comme il s'y attendait, elle se dégagea de son étreinte. Elle essuya les larmes de son visage et éluda sa question :

"Je peux prendre ma journée ?"
"Bien sûr... fais attention à toi."

Elle lui lança un dernier regard. Il vit à l'intérieur de celui-ci qu'elle l'implorait de comprendre quelque chose. Mais la seule chose qu'il voyait... cela ne pouvait pas être ça. Elle ne pouvait pas...Non, ce n'était pas de l'amour qu'il avait vu sur son visage, il le savait. Pourtant, cela expliquerait tout. Mais il chassa cette idée de sa tête, cela ne pouvait pas être ça. Elle s'éloigna. Il se retrouva seul une fois de plus, déboussolé comme jamais.

Gillian arriva chez elle. Elle prit juste le temps de fermer sa porte et se jeta sur son lit, laissant son chagrin éclater véritablement. Elle pleura jusqu'à ne plus avoir de larmes. Elle n'en pouvait plus, une vague de sensations l'assaillait, à lui en faire perdre la tête. Elle se surprit à songer à en finir.

"Je serais plus tranquille..."

En s'entendant prononcer ces mots, elle frémit. Elle se rendit compte de ce qu'elle avait failli faire : elle réalisa l'ampleur que la situation avait prise. Elle devait se ressaisir. Tout d'abord pour elle-même. Elle ne se reconnaissait plus, elle avait beaucoup changé. Mais c'était surtout pour Cal qu'elle devait réagir. Elle n'arrivait plus à l'ignorer, il lui manquait terriblement. Elle n'avait pas pensé à sa souffrance à lui, mais ce matin elle l'avait bien vue dans ses yeux. Après tout, même s'il n'était pas amoureux d'elle, ils pourraient rester amis. Ce serait mieux que de souffrir en silence chaque de leur côté. Elle se maudit de ne pas y avoir pensé plus tôt, cela leur aurait évité bien des soucis. Elle s'en voulut de son égoïsme. Désormais, peu lui importait sa réaction, il fallait juste qu'elle le lui dise.
Déterminée, elle regarda l'heure. Il était déjà 17h. Elle réalisa qu'elle avait passé toute la journée à se morfondre, ce qui la décidé d'autant plus à tout avouer. Elle prit le volant, priant pour que Cal ne soit pas déjà parti. Lorsqu'elle entra dans le bâtiment, elle tomba sur Eli, qui fut surpris de la voir.

"Gillian ? Qu'est-ce que vous faites ici ?"
"Je... Est-ce que Cal est là ?"
"Non je suis désolé, il est déjà parti."
"Oh... Je m'en doutais... Ce n'est pas grave, tant pis."

Eli voyait toute la déception sur le visage de sa collègue et il regretta de ne rien pouvoir faire de plus.

"Je peux lui passer un message de votre part ?"
"Dites-lui juste que je suis passée et... qu'il me rappelle à la maison..."
"Très bien. Je dois lui dire aussi dans quel état vous étiez ?"
"Ce sera pas la peine..."

Eli lui sourit et se retira. Une idée traversa l'esprit de Gillian. Elle leva la tête vers une des caméras du couloir et murmura quelque chose, comme pour elle-même, puis elle s'en alla. En rentrant dans sa voiture, elle sourit. C'était un parfait compromis. Elle espérait simplement que Cal ferait ce à quoi elle venait de penser.

Gillian avait attendu toute la soirée que Cal appelle. Lorsque la nuit arriva, elle enfila machinalement sa chemise de nuit et se mit au lit, mais sans grand espoir de trouver le sommeil. Toutes les trente secondes, elle vérifiait son portable, tout en sachant très bien qu'il n'avait pas sonné. Elle finit par le garder à la main. Vers une heure du matin, elle n'était toujours pas endormie. Elle se retourna sous ses couvertures, furieuse contre elle, et s'écria dans le silence :

"Gillian, tu es complètement secouée ! C'est évident qu'il ne va pas t'appeler, puisqu'il était parti hier ! Eli n'a pas eu le temps de le prévenir ! Tu auras ton appel demain !"

Un peu rassurée par son subconscient, elle parvint à s'endormir. Comme elle était épuisée, elle ne se réveilla que vers midi. Affolée, elle se précipita sur son téléphone. Aucun appel. Elle fut à la fois déçue mais soulagée de n'avoir rien raté. Elle espérait qu'Eli n'avait pas oublié. Elle décida de rester chez elle à attendre ce coup de fil. Elle ne voulait pas voir Cal en face avant de l'avoir eu au téléphone. Elle s'habilla et s'assit sur son lit, portable en main, et attendit.

Vers 14h, Cal Lightman entra dans ses bureaux, où il croisa Ria.

"Bonjour Ria."
"Bonjour Cal. Tout va bien ?"
"Oui, Emily était malade ce matin, je suis resté avec elle."
"Oh... Elle n'a rien de grave ?"
"Non, rien qu'une petite indigestion, mais j'ai préféré ne pas la laisser seule."
"Bien sûr."
"À part ça vous avez quelque chose à me dire vous, non ?"
"Eli vous cherche partout depuis ce matin, il dit que c'est très important."
"D'accord, merci Ria."

Cal partit à la rencontre de Loker. Que pouvait-il bien avoir à lui dire ? Était-ce à propos de Gillian ? Il le croisa quelques minutes plus tard.

"Loker !"
"Ah, bonjour Dr Lightman !"
"Ria m'a dit que vous vouliez me parler. C'est à propos de Gillian ?"
"Comment le savez-vous ?"
"Je l'ignorais, mais si vous m'aviez répondu non je ne vous aurais même pas écouté."
"Gillian est passée, hier soir."
"Quoi ? Quand ?"
"Vers 17h. Elle voulait vous parler, mais vous étiez parti. Alors elle m'a dit de vous dire de la rappeler."
"Et c'est maintenant que vous me le dites ?"
"Ben vous n'étiez pas là... comment vouliez-vous que je..."
"Vous auriez pu... Non, vous auriez DU m'appeler ! Vous avez vu dans quel état elle était hier ?"
"Je..."
"SI ELLE VOULAIT ME PARLER, C'EST QUE C'ÉTAIT IMPORTANT, PEUT-ÊTRE MÊME GRAVE NON !? ET VOUS NON, VOUS ATTENDEZ GENTIMENT QUE JE ME POINTE, POUR ME SORTIR AVEC VOTRE AIR D'ILLUMINÉ QUE ÇA FAIT PRESQUE 24H QUE GILLIAN ATTEND QUE JE L'APPELLE ! NON MAIS QU'EST-CE QUE VOUS AVEZ DANS VOTRE TÊTE DE CON, LOKER ?"
"ET VOUS LIGHTMAN !? C'EST SEULEMENT MAINTENANT QUE VOUS VOUS RENDEZ COMPTE QUE GILLIAN A BESOIN DE VOUS ! VOUS N'ÊTES MÊME PAS FOUTU DE REMARQUER QUE VOTRE MEILLEURE AMIE EST AU BORD DU GOUFFRE DEPUIS UN MOIS ! IL FAUT QUE VOUS ATTENDIEZ QU'ELLE S'EN PRENNE À QUELQU'UN POUR COMPRENDRE QU'ELLE NE VA PAS AUSSI BIEN QU'ELLE NE LE LAISSE PARAÎTRE ! ET APRÈS, VOUS VOUS VANTEZ DE VOIR LA VÉRITÉ PARTOUT ! MAIS EN RÉALITÉ VOUS ÊTES TROP CON ET IMBU DE VOUS-MÊME POUR COMPRENDRE QUE DES GENS TIENNENT À VOUS ET SOUFFRENT PAR VOTRE FAUTE ! SI HIER VOUS AVIEZ ÉTÉ LÀ, VOUS AURIEZ VU GILLIAN ! MAIS NON, CE QUI INTÉRESSE LE GRAND CAL LIGHTMAN, C'EST DE BAISER AVEC SON EX-FEMME !"
"SORTEZ D'ICI LOKER, JE NE VEUX PLUS VOUS VOIR !"

Avant de s'en aller, Eli se retourna vers lui et lui dit avec le peu de voix qui lui restait :

"La vérité vous fait si mal que ça, Lightman ?"

Puis il s'éloigna. Cal resta un moment silencieux, puis il chassa tous les employés curieux, en réalité tous les employés tout court, qui avaient été attirés par les cris émanant de la dispute. Il se rendit à son bureau, ferma la porte à clé et s'assit sur son fauteuil. Il se prit la tête dans ses mains et soupira. Car en effet, cette vérité lui avait fait mal.

Oui, les paroles d'Eli l'avaient fait souffrir. Tout d'abord parce qu'elles venaient d'un ami. Et aussi parce que cet ami était adepte de "l'honnêteté radicale" : il pensait donc exactement tout ce qu'il lui avait dit. Et intérieurement, Cal partageait son avis sur certains points. En réalité, tous ceux qui concernaient Gillian.

Oui, il ne remarquait que maintenant à quel point Gillian était mal.
Non, il ne s'était pas rendu compte qu'elle souffrait.
Non, il n'avait pas vu que c'était de sa faute.
Oui, il était vraiment trop con.

Il ne savait que faire. Il fallait qu'il l'appelle, mais pour lui dire quoi ? Il attendit, retardant le plus possible le moment fatidique où il devrait composer son numéro. Puis une idée lui traversa l'esprit. Il alluma son ordinateur, rentra la date de la veille, programma l'heure à 17h et passa une par une les vidéos des caméras disséminées un peu partout dans les locaux. Et il tomba sur celle qu'il voulait et arrêta l'avance rapide. L'entrevue entre Eli et Gillian n'avait pas duré plus de deux minutes. Lorsqu'il vit Eli s'en aller, il s'apprêta à arrêta la vidéo mais il vit Gillian se tourner vers la caméra. À travers l'écran, elle le fixait de ses yeux qu'il trouvait magnifiques, et ce regard indirect le mit mal à l'aise. Elle murmura quelque chose puis s'éloigna. Comme il n'avait pas saisi, il repassa la vidéo en augmentant le son.

"... lui dire aussi dans quel état vous étiez ?"
"Ce sera pas la peine..."

"Je voudrais qu'il le voie lui-même"

En effet, il avait vu. Il n'y avait pas à se creuser la tête. Tristesse et amour. Il regarda son reflet dans l'écran, il y vit la même chose. Tristesse pour avoir laissé Gillian seule, pour l'avoir laissé souffrir. Amour parce que c'était ce qu'il avait toujours ressenti pour elle. Même quand il était encore marié avec Zoé. La première fois qu'il l'avait rencontrée, au Pentagone, il avait tout de suite été attirée par elle. Quand elle avait divorcé d'avec Alec, il avait été plus heureux qu'il ne l'aurait dû. Chaque fois qu'elle le prenait dans ses bras, son coeur ratait quelques battements et il avait envie que cela dure éternellement. Mais jamais il n'avait réussi à lui avouer tous les sentiments qu'il éprouvait pour elle. Il aurait peut-être dû. Et il se décida. Il avait vu qu'elle partageait ses sentiments, il ne fallait plus qu'il hésite. Plein de détermination, il attrapa son portable et composa son numéro, qu'il connaissait par coeur.
Mais au dernier moment, il n'appela pas. Et s'il n'avait vu que ce qu'il avait voulu voir ? Si Gillian était juste triste pour une quelconque raison ? Après tout, elle aussi avait failli mourir dans cet attentat, et elle avait vu des choses horribles.
Mais elle avait dit que c'était de sa faute. Il se souvint des paroles de Ferguson "Vous aussi vous êtes amoureuse de la personne qu'il ne faudrait pas." Il avait d'abord pensé que cette phrase le visait. Mais Gillian n'aurait pas frappé ce type, alors. Elle aurait été gênée, mais pas furieuse. Si elle l'aimait vraiment, pourquoi passer son temps à l'éviter, à ne plus vouloir aucun contact ? Cela se confirmait, il n'avait vu ce sentiment d'amour que parce qu'il le voulait. Il finit par s'en convaincre. Il allait tout de même l'appeler, mais il ne lui dirait rien dessus. Il ne voulait pas paraître ridicule et lui causer encore plus de soucis qu'elle n'en avait déjà.

À quelques kilomètres de là, le coeur de Gillian Foster fit un bond lorsqu'elle entendit la sonnerie de son téléphone retentir et le nom de "Cal Lightman" s'afficher sur son écran. Le coeur battant la chamade, elle décrocha.

"Bonjour Gillian."
"Cal !"
"Je suis désolé de ne pas t'avoir appelée plus tôt... Eli vient seulement de me dire que t'étais passée."
"C'est pas grave, tu as appelé, c'est le principal."
"Tu voulais me parler ?"
"Tu n'as rien à me dire d'abord ?"
"En réalité, si."
"Vas-y."
"Je... J'ai regardé la vidéo du couloir. Je crois avoir vu ce que tu voulais me dire..."

Gillian crut que son coeur allait imploser. Il avait regardé les caméras de surveillance comme elle l'espérait. Il avait vu qu'elle l'aimait. Il était sur le point de lui dire ce qu'elle attendait depuis si longtemps.

"Tu es bouleversée par ce qu'il s'est passé lors de cet attentat. Au départ je pensais que c'était à cause de ce que tu avais vécu, parce que tu avais dû laisser mourir ce jeune homme et que tu avais failli mourir mais tu m'as dit que c'était de ma faute. J'ai compris que c'était parce que tu avais eu peur de me perdre. Je comprends ta tristesse. J'aurais ressenti la même chose si cela avait été toi, parce que..."
"Oui ?"
"Parce que tu es ma meilleure amie."

Les derniers espoirs de Gillian s'envolèrent avec ses mots. La chute fut très brutale. Elle fut telle qu'elle crut défaillir. Il n'avait donc rien compris. Il ne pensait même pas qu'elle avait eu si peur parce qu'elle était amoureuse de lui. Quand il avait commencé à parler de l'attentat, elle avait commencé à avoir des doutes. Mais jusqu'au dernier moment, elle avait été assez naïve pour croire qu'il allait lui dire Je t'aime au détour d'une phrase. Non, à ses yeux, elle n'était que sa meilleure amie. Elle ne serait jamais rien de plus. De nouveau des larmes commencèrent à affluer sur ses joues et sa volonté d'en finir revint au galop. Inquiet de ce silence, Cal se remit à parler.

"Gillian ? Ça va ?"

POV Gillian
Comment veux-tu que ça aille ? Tu viens de me dire que tu n'éprouvais que de l'amitié pour moi, et je devrais aller bien ? Décidément tu ne comprends rien. JE T'AIME CAL ! Pourquoi est-ce que tu ne le vois pas ? Pourquoi est-ce que tu ne le comprends pas ? Ça ira quand tu m'aimeras. Ria m'a raconté ce qu'Eli t'a dit. Au début, je me suis voilé la face mais je me rends compte qu'il a raison : tu ne penses qu'à Zoe. Si elle n'était pas la mère d'Emily, je crois que je l'aurais tuée, elle m'insupporte. Je ne sais même pas ce que tu lui trouves. Elle ne te mérite pas. Je n'arrive même plus à penser tellement la haine et la tristesse m'accablent.
J'aimerais te dire tout ça mais tu ne comprendrais pas. Je vais continuer de te mentir, c'est ce que j'ai de mieux à faire. De toutes façons, tu ne le verras même pas.

"Oui ça va... Je vais pas t'embêter avec ça. Repose-toi."
"Bon... si t'as besoin, tu m'appelles."

Pars pas trop loin de ton téléphone alors. Pff, il n'insiste même pas, il se fout complètement de moi. Je n'ai plus le courage... Comment est-ce que je pourrais continuer à travailler à ses côtés maintenant, déjà que je n'y arrivais plus avant ? Et je crois que dès que je croiserais Zoe, je ne pourrais pas m'empêcher de lui sauter dessus. Je ne pourrais pas lui cacher indéfiniment. Je ferai une bourde à un moment donné, je me dévoilerai... Je vais aller de plus en plus mal.
Non, il vaut mieux en finir tout de suite. Il vaut mieux que je parte maintenant.